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En terre sainte

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En Terre Sainte, nous avons marché dans les pas de Jésus…

Messe face au Mont de la Quarantaine

Relire la parole de Dieu dans la culture où elle s’est faite chair, était le sens de ce pèlerinage en Terre Sainte, où trente-quatre pèlerins, sous la bannière jaune du diocèse de la Nièvre, ont cheminé dans les pas de Jésus du 7 au 15 novembre 2017. Le père Jacques Billout, recteur de l’Espace Bernadette de Nevers avec le diacre Michel-Eric Jacquier et son épouse Françoise, accompagnaient spirituellement le groupe, fasciné et passionné par la découverte des Lieux Saints, des paysages et des soubresauts de l’histoire…

Pays d’Orient en bordure de la Méditerranée, la Terre Sainte qui s’étale sur 550 km du nord au sud paraît bien modeste. En effet, délimitée par les frontières libanaise, syrienne, jordanienne au nord et à l’est, par celle du désert du Sinaï au sud, elle est au point de rencontre de trois continents et des trois religions monothéistes. Pourtant, son rôle dans l’histoire de l’humanité est considérable et l’histoire ne cesse de s’y écrire quotidiennement depuis plus de 9000 ans avant JC…

Pour nous chrétiens, cette Terre est celle sur laquelle Jésus est né, a vécu, a souffert. C’est là, qu’Il a annoncé le Royaume des Cieux et réalisé de nombreux miracles. C’est pourquoi, Partir, Ecouter, Louer, Expérimenter, Relier, Initier, Naviguer, Aimer, Guérir, Envoyer sont les verbes actifs que l’on retrouve dans le mot PELERINAGE et qui nous ont « parlés » tout au long de ce voyage peu banal.

Bethléem, là où Dieu s’est fait homme

Vue sur Bethléem

Beit Lehem, en hébreu signifie la « maison du pain ». Pour tout pèlerin, elle est en priorité le lieu de la naissance de Jésus, issu de la lignée du roi David. La ville de trente-quatre mille habitants et de neuf mille huit cents chrétiens, s’étale sur les flancs d’une colline rocheuse à 860 mètres d’altitude, à dix kilomètres au sud de Jérusalem.

On y accède en franchissant un check-point entouré de miradors. Notre hébergement à la Casa Nostra, jouxte la basilique de la Nativité, un des chefs d’œuvre de l’art byzantin. Les franciscains, arméniens et orthodoxes se partagent la garde de ce Lieu Saint, aujourd’hui en travaux de restauration.

L’étoile de Vermeil symbolise le lieu de la naissance du Christ

L’accès à la grotte de la nativité, étroite et sombre en raison des murs noircis par la fumée des cierges et des lampes à huile, fut long et difficile. Les pèlerins affluent et forment de longs cortèges d’attente dans la nef de la basilique en travaux, avant de réussir à se glisser par deux devant l’autel. Mais se recueillir sur le lieu traditionnel de la naissance de Jésus est un des temps forts de notre démarche. Une étoile de vermeil datée de 1717, scellée dans du marbre blanc symbolise l’endroit où le Christ est né, il est écrit en latin : Hic de Virgine Maria Jesus Christus natus est.

Dans l’enceinte fortifiée de la basilique, nous avons partagé à l’église Sainte Catherine d’Alexandrie l’office dominical co-célébré avec la communauté arabo-chrétienne. Un accueil très chaleureux dans une authentique communion de prière, émut nombre d’entre nous. Ce jour-là, nous avons communié sous intinction*, et malgré les différences linguistiques, notre foi chrétienne nous disait bien toute sa dimension universelle…

A Bethléem, c’est essentiellement la naissance de Jésus qui nous est racontée à travers différents sites : La grotte du lait, où Marie a nourri son enfant avant la fuite en Egypte et le Champs des Bergers, où les anges sont apparus aux bergers qui montaient la garde.
Avec la naissance du « prince de la paix » (Isae 9,5) Bethléem devient vraiment « la maison du pain » de vie (Jean 6).

En Galilée, à Nazareth où Jésus a grandi

Capitale de la Galilée, Nazareth aujourd’hui est une agglomération cosmopolite, en pleine expansion, qui compte moins de trente-cinq mille chrétiens sur une population globale de quatre-vingt-dix mille habitants. La coexistence entre une communauté juive croissante et une communauté arabe composée de grecs orthodoxes, de grecs catholiques et latins est compliquée : les Arabes accusent les Israéliens d’occuper leurs terres.

Dans la chapelle de l’Unité, à Nazareth

Pourtant, c’est dans cette cité, que l’ange Gabriel est apparu à la Vierge Marie pour lui annoncer la naissance de son fils. Reçus au Centre International de Marie de Nazareth, nous avons participé à la messe dans la chaleureuse et lumineuse chapelle de l’Unité. Illustrée d’icônes originales des vingt mystères du rosaire, nous nous sommes rassemblés autour de l’autel, sous le regard de l’ange Gabriel tourné vers la Vierge Marie. En communion, nous avons prié dans ce lieu de célébration des offices de la Communauté du Chemin Neuf et y avons déposé, dans le secret des cœurs, nos intentions de prière aux pieds de la Vierge.

Avec l’Annonciation, le mystère de l’incarnation prend forme…

Remplis d’émotion, nous sommes allés nous recueillir à l’église Saint Gabriel, à la Source de la Vierge, puis devant la grotte, dans la basilique de l’Annonciation. Sur le tympan de cet édifice moderne qui s’impose largement au centre de la ville, il est écrit en latin, Verbum carum factum est : le Verbe s’est fait chair.

Le secret de Nazareth, nous a confié une religieuse, consiste à accueillir l’Esprit Saint et à transformer l’ordinaire en extraordinaire…
Formidable accueil chez les petites sœurs de Nazareth, installées sur le lieu de vie de la Sainte Famille, là où Joseph exerçait son métier de menuisier, et où Jésus a passé les trente premières années de sa vie. Au cœur du bazar, près de l’église grecque catholique, nous avons marqué un temps de prière dans la synagogue, celle précisément dans laquelle Jésus se rendait régulièrement. Enclavée entre des habitations ancestrales, elle nous a semblé nettement plus étroite et modeste que nous ne l’imaginions !

La basilique de la Transfiguration sur le Mont Tabor

Ensuite, nous avons rejoint le mont Tabor, afin de nous imprégner d’un nouvel épisode de la vie de Jésus, apparenté à la lumière de Dieu. Etonnés par la hauteur de la montagne, qui culmine à 588 mètres et par la couleur vert foncé, car enveloppée de résineux, nous avons découvert la basilique de la Transfiguration tenue par les franciscains. Elle jouxte l’église Saint-Elie, domaine des grecs orthodoxes. La coupole bleu-azur de cette basilique tapissée de petites mosaïques et d’anges attentifs, invite au recueillement et à la méditation, notamment en fin de journée lorsque le ciel se constelle d’étoiles et que la nuit se déploie sur le mont empreint de mystère. En effet, la Transfiguration annonce déjà, au-delà des ténèbres de la mort, un monde nouveau …

La révolution du bonheur

Le Mont des béatitudes

Toujours en Galilée, au nord de Tabgha, lieu de la multiplication des pains, nous avons foulé, surplombant les eaux du lac de Tibériade, les pentes d’une colline verdoyante, parsemée de vignoble et de bougainvilliers roses et blancs. Au sommet, l’église franciscaine à la structure octogonale, construite en 1937, rappelle qu’à cet endroit, la tradition situe la proclamation des Béatitudes. On peut y lire sur chacun de ses murs l’inscription de l’une des huit d’entre elles. Chacun parmi nous en a choisi une pour la méditer et la partager autour d’un temps de recueillement prévu dans les jardins, à l’ombre des palmiers dattiers.

Traversée du lac

« Heureux les pauvres de cœurs : le Royaume des cieux est à eux ! » La première des Béatitudes contient toutes les autres. Elles annoncent une vision qui déplace, bouscule les valeurs en exaltant la pauvreté et l’humilité. Seul, Jésus les a toutes vécues…
C’est également sur les bords du lac de Tibériade, que Jésus appela ses premiers disciples, Simon, André, Jacques et Jean, qu’il multiplia les pains et réalisa la pêche miraculeuse…

Il va de soi que l’itinéraire parcouru jusqu’alors entre montagnes, vallées, eau et sable du désert ne peut que nous inviter à considérer les textes des évangiles avec un regard différent. Les lieux que nous découvrons et sur lesquels nous cheminons, nous parlent avec une nouvelle acuité. Jésus, le nazaréen, nous devient plus proche et son enseignement enraciné sur la terre, prend petit à petit « corps » en nous. Dieu qui s’est fait homme sur cette Terre Sainte en son fil Jésus, bouleverse aussi nos vies…

Un territoire fragmenté

Pèlerins de passage, notre objectif était d’atteindre la Ville Sainte en quelques jours.
Adieu la Galilée, nous « montons » vers Jéricho, où la chaleur est vive, empruntant les routes du désert de Judée, caractérisées par de hauts plateaux calcaires, le long de la vallée du Jourdain.
Une inhabituelle impression d’émiettement territorial nous frappe alors à notre arrivée en Cisjordanie. En effet, la présence de nombreux barrages militaires aux portes d’entrée et de sortie des villes autonomes palestiniennes, nous rappelle que la Terre Sainte est toujours sous tension. Nous avons cependant franchi ces checkpoints israéliens sans jamais être arrêtés, ni même inquiétés. A ce moment, la situation paraissait relativement apaisée, malgré l’asymétrie des rapports de force entre les deux populations. Quelques trois cents mille colons vivent en Cisjordanie, tandis que les Palestiniens construisent les habitations des colonies israéliennes…

À Taybey, en Palestine chez les petites soeurs de Charles de Foucault

A Taybeh, village perché à flanc de colline, nous sommes reçus de manière profondément touchante et accueillante chez les petites sœurs de Charles de Foucault qui vivent en communauté réduite. Elles rayonnent « avec la sainte croix de Jérusalem » dans ce village arabe entièrement chrétien. Leur présence active, à travers l’enseignement et l’éducation auprès des familles enclavées dans ce territoire morcelé, a vocation à créer des ponts de fraternité entre les langues et les cultures…Tous les pays du Moyen-Orient sont en crise, nous expliquait l’une des religieuses d’origine libanaise, et la crise du christianisme oriental est précisément celle des sociétés arabes. Viscéralement ancrés dans leur territoire, car la terre fait partie de leur identité, les chrétiens d’Orient se sont toujours adaptés et façonnés de nouveau, à partir de situations dans lesquels ils sont plongés. Christ est venu, mais il est toujours à venir ; il est ressuscité mais il attend continuellement de ressusciter en nous !

La Jérusalem des Lieux Saints

Vue sur Jérusalem depuis le Mont des Oliviers

Entrée à Jérusalem par la porte de Damas

Capitale religieuse, Jérusalem, qui signifie paix, est avant tout la Ville Sainte pour la moitié de l’humanité et les trois grandes religions, qui se partagent le monde. C’est en psalmodiant le psaume des montées que nous aussi, à l’image de tout juif qui monte à Jérusalem, sommes entrés dans la ville Sainte après cinq jours d’itinérance en Galilée, Samarie et Judée.

A l’intérieur de la ville close, nous avons pleinement pris conscience de ce que fut le chemin de croix de Jésus. Dans le dédale des rues pavées, étroites, planes ou en escaliers, jalonnées d’échoppes et d’estaminets, encombrées de passants affairés, de pèlerins du monde entier, indifférents ou méprisants, nous avons emprunté la Via dolorosa avec ses quatorze stations, qui nous ont conduits à l’Eglise du Saint Sépulcre, sur le Golgotha.

Dans les ruelles de la vieille ville

Le parvis du Saint Sépulcre, un après-midi de semaine

Chacun porte sa croix, entend-on fréquemment ! En effet, depuis que Jésus a souffert pour nous, la croix est devenue le symbole de Dieu compatissant à la douleur de toutes ses créatures. Signe de souffrance, de la délivrance de toute souffrance, c’est à Jérusalem que fut érigé ce paradoxe de la croix, symbole de l’espoir, de la fidélité et de l’amour éternel de Dieu.

Des conférences vivifiantes

Marie-Armelle Beaulieu, rédactrice en chef du magazine Terre Sainte, nous a accueillis dans le quartier général des franciscains au cœur de la vieille ville, afin de nous entretenir de la situation contemporaine des chrétiens d’Orient et nous rappeler le rayonnement de Saint François d’Assise. La Custodie franciscaine célébrait en 2017, le huit-centième anniversaire de sa présence en Terre Sainte, arborant sur ses bâtiments le drapeau blanc marqué de la célèbre croix rouge de Jérusalem. En raison de l’attachement spécial des franciscains à l’Evangile de Jésus et à son Incarnation, le pape Clément VI leur confia la garde des Lieux Saints avec la mission de les animer au travers de la liturgie. Aimer les pierres qui conservent la mémoire de Jésus nous pousse également à aimer les pierres vivantes, nous a livré un frère, vêtu de la longue tunique marron resserrée à la taille par un cordon blanc. A côté des Lieux Saints, la Custodie franciscaine, engagée dans la réalité sociale, a également la responsabilité des nombreuses et différentes paroisses des communautés chrétiennes de rites et traditions catholiques occidentales et orientales. Il n’existe pas moins de treize confessions chrétiennes pour 180 000 personnes !

En route vers Gethsemani

Les lampes à huile au-dessus de l’entrée du tombeau de Jésus

Ne rentrez pas chez vous comme avant ! nous a vivement conseillé Marie-Armelle Beaulieu, soulignant par cet apostrophe que notre découverte des Lieux Saints est liée à la prise de conscience de ce que signifie être chrétien.

Une religion bien comprise, c’est la clé du bonheur ! nous a ensuite affirmé le rabbin Alain Michel, polytechnicien à la retraite, délégué en Israël pour « le vivre ensemble » avant d’assister à la messe dans une chapelle du Saint-Sépulcre. Son intervention nous a bousculés par son optimisme « raisonné ». Il croit profondément à un avenir meilleur grâce à la spiritualité et à la foi. De ce fait, le démantèlement de Daech en Syrie, fut accueilli avec un immense soulagement par les différentes confessions d’Israël, qui y voient un signe d’Espérance pour l’humanité. Réussir à communier autour des mêmes valeurs, dans un idéal d’amour et de justice est une règle en Terre Sainte : par l’exercice du vivre ensemble, il est possible de faire changer les choses.

Si Jérusalem est l’objet d’un accaparement, en devenant la capitale d’Israël, le processus de paix en négociation depuis plus de soixante-dix ans risque d’être suspendu. Si la paix devenait possible dans un lieu aussi intense humainement et spirituellement, où ne le serait-elle pas ? interrogeait le pape François le 7 décembre dernier…

Ne cherchez pas parmi les morts celui qui est vivant !

Au terme de notre voyage, nous avons unanimement éprouvé le sentiment d’avoir accompli un chemin qui nous à la fois enrichis, transportés et revigorés. Pèleriner en Terre Sainte est une véritable aventure, qui entraîne aux sources de la foi et invite à rencontrer Jésus dans son « univers ». Mais aussi étrange que cela puisse paraître, il n’est pas besoin de venir à Jérusalem pour rencontrer le Christ, puisqu’Il est partout !

Ne sommes-nous pas, à l’image des deux disciples en chemin vers Emmaüs ? Nous ne savons pas toujours ouvrir nos yeux pour reconnaître que Jésus marche à nos côtés… Notre condition de pèlerin est une réelle invitation à témoigner que Jésus est vivant auprès de ceux que nous rencontrons !

Fabienne Savajols

*Communier sous intinction signifie communier sous les deux espèces, le pain et le vin