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Communiqué de Monseigneur Thierry Brac de la Perrière sur la loi de bioéthique

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Aux catholiques de la Nièvre

Frères et sœurs,

La loi dite de « bioéthique » est en discussion à l’Assemblée Nationale. Les dispositions prévues dans cette loi concernent en particulier la procréation médicalement assistée, ainsi que l’utilisation de l’embryon humain et plus largement du génome humain.

Les évêques de France ont largement contribué au débat sur les enjeux de cette loi, et l’on peut aisément trouver les éléments de cette réflexion sur le site de la Conférence des évêques : https://eglise.catholique.fr/sengager-dans-la-societe/eglise-et-bioethique. Tout dernièrement, une table ronde a été organisée au Collège des Bernardins pour présenter la position de l’Eglise sur le sujet, et une équipe dirigée par Mgr Pierre d’Ornellas a publié un livre accessible à tous : « Bioéthique : quel monde voulons-nous ? » (Bayard – Cerf – Mame).

Aujourd’hui le débat s’engage au niveau parlementaire, et peut aboutir à des changements majeurs dans notre société. Déjà, la loi votée en 2013 transformait la nature du mariage. L’évolution qui se profile est dans le prolongement de cette dérive : la filiation est remise en cause dans sa nature même, en étant détachée de son fondement biologique. L’autorisation de l’assistance « médicale » à la procréation en dehors des cas d’infertilité,  et son ouverture aux femmes seules et aux couples de femmes, est lourde de conséquences :

  • substitution d’un « donneur » à un père réel, en niant le besoin de paternité réelle. Selon les promoteurs du projet de loi, la fonction de père peut être remplie par « une femme, une altérité ailleurs dans la famille, des oncles, une grand-mère », comme si la fonction paternelle n’était que symbolique et interchangeable.
  • substitution d’une « maternité d’intention » à une maternité réelle, avec cette conséquence législative que « la femme qui accouchera sera mère de  l’enfant, celle qui n’accouchera pas sera tout autant mère de l’enfant », considérant que « à bien des égards, c’est un progrès majeur pour notre société ». C’est en vérité un désastre que cette confusion des genres (au sens propre), cette négation de l’altérité sexuelle comme constitutive de notre humanité, cette considération de la procréation comme simple union biologique de gamètes, et non comme union des corps et des cœurs, accueil d’une vie, dans une responsabilité paternelle et maternelle égale et pourtant différenciée. C’est une véritable violence faite aux enfants que les priver volontairement de leur père (un donneur anonyme est le père biologique), niant leur besoin fondamental de double filiation père-mère. Combien d’enfants, d’adolescents, d’adultes, sont en quête de père, et plus généralement de leur origine ! Combien de souffrances dans ce manque de vrai lien avec un père !
  • confusion et torsion des principes de la filiation, telle qu’elle sera inscrite dans le code civil. La négation ou tout au moins la relativisation du lien charnel laisse libre cours à toutes les combinaisons, au détriment de l’enfant lui-même. Alors même que l’on veille à la traçabilité la plus précise des aliments, on interdit à un être humain l’accès à ses origines, rendues anonymes par le don (et plus tard la vente) de gamètes.

 

Par ailleurs, l’autorisation de recherches sur l’embryon humain, de création d’embryons transgéniques, d’utilisation des neuro-sciences à visée eugéniste, tout cela entraîne la société française dans une voie dangereuse.

On peut noter par ailleurs un double dévoiement de notre vie sociale :

  • dévoiement du rôle de la médecine, initialement destinée à soigner et désormais mise au service des désirs de chacun. Sans compter le financement d’actes non thérapeutiques par la Caisse d’assurance maladie ;
  • dévoiement du rôle du législateur, initialement censé servir le bien commun, l’intérêt général, et désormais au service des intérêts particuliers et soumis aux exigences du marché.

 

Les chrétiens que nous sommes ne peuvent que s’inquiéter de ces dérives. Ces questions de société ne sont pas les seules sur lesquelles nous sommes invités à agir, au nom même de notre sens de l’homme. Nous devons être sur tous les terrains de la justice et de la paix. Cependant, se profilent avec ce projet de loi des violences qu’il importe de dénoncer :

  • Violences envers les enfants que l’on fait naître délibérément sans père ;
  • Violences envers la société française que l’on manipule politiquement et médiatiquement, au mépris de l’état réel de l’opinion publique, et en fermant les yeux sur les conséquences sociales de cette évolution ;
  • Violences envers l’homme lui-même, dans l’unité de sa personne tout à la fois charnelle, psychique et spirituelle, dans sa réalité sexuée, qui engage tout l’être et pas seulement l’union de gamètes. Violences envers l’être humain que l’on traite comme un simple ensemble de cellules utilisables à loisir.

 

Nous sommes invités à manifester nos inquiétudes sur cette évolution, au nom de l’importance que nous accordons à la qualité de notre vie sociale. Certains d’entre nous souhaitent le faire dans la rue, d’autres par d’autres moyens. C’est la liberté de chacun, dans un esprit pacifique et constructif.

Pour ma part, je souhaite que l’on n’omette pas la dimension du jeûne et de la prière, car toute notre vie doit être remise entre les mains de Dieu : nos joies, nos souffrances, nos peurs, nos désirs. C’est de lui seul que vient le salut de l’homme, bien au-delà des évolutions de nos sociétés.

Je me tiendrai donc à la cathédrale de Nevers le 1er octobre, premier jour du mois du Rosaire et du Mois missionnaire extraordinaire, entre 19h et 21h, pour méditer les mystères du Rosaire et porter dans la prière la France et le monde. J’invite ceux qui le veulent et le peuvent à prier avec moi, soit à la cathédrale, soit dans leur paroisse, soit dans leur maison.

Que le Seigneur Jésus, à la prière de la Vierge Marie, nous façonne un cœur selon Son cœur, une humanité selon Son humanité.

 

Nevers, le 26 septembre 2019

+ Thierry Brac de la Perrière, évêque de Nevers