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Editorial : Sommes-nous… Jésus ?

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Sommes-nous… Jésus ?

 

Comment ne pas revenir sur les événements qui ont frappé notre pays le mois dernier et connaissent des prolongements dans le monde ? L’attentat contre Charlie Hebdo, c’était un attentat contre la liberté de la presse, mais aussi contre l’occident, mais aussi contre les chrétiens ! En effet, paradoxalement, ce journal si souvent hostile à l’Eglise, est perçu par certains comme une émanation de l’occident chrétien, tant demeure dans les esprits le schéma d’un occident tout entier chrétien et d’un monde arabe tout entier musulman. Les destructions d’églises de même que les slogans anti-français ont bien montré ces amalgames. Amalgames auxquels il est difficile d’échapper nous-mêmes, lorsque nous associons, en pensée ou en paroles, islam et violences.

Les causes de cet attentat de même que ses répercussions dépassent considérablement notre pays. Et dépassent aussi l’entendement. Comment comprendre, en effet, cette onde de violence extrême qui parcourt le monde, sinon en la situant dans sa source la plus obscure et la plus profonde, qui est le « prince des ténèbres » ? Et comment réagir à cela, sinon comme enfants de lumière ? Cela veut dire deux choses :

D’abord, tourner vers Dieu nos angoisses et nos tentations de toutes sortes, qui vont de la colère au repli identitaire. Car le péché à l’œuvre dans le monde n’empêche pas Dieu d’aimer ce monde et chacun de ses habitants. « Pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font », dit Jésus sur la croix. Et sur cette croix, il s’identifie à chacun d’entre nous, il donne sa vie pour chacun d’entre nous, malgré tout ce qu’il a à nous reprocher. Ainsi peut-il dire, non pas « je suis Charlie », mais « je suis chacune des victimes » tuées au nom d’une cause, tuées au nom même – dévoyé – de Dieu. Mais il est mort aussi pour sauver les bourreaux. « Dieu ne veut pas la mort du pécheur mais qu’il se convertisse et qu’il vive » (cf. Ezéchiel 18,23).

La deuxième réaction est de demander la grâce de notre propre conversion : de repérer et de traquer, à la lumière de l’Esprit Saint, tout ce qui dans notre propre cœur est un germe de haine de l’autre ou de simple fermeture à l’autre.

Le temps du carême qui commence bientôt est fait pour cela. Il est l’occasion de prendre à nouveaux frais le chemin original tracé par Jésus, un chemin au rebours de ceux que nous prendrions spontanément : le chemin de la croix, de l’abandon total de nos prétentions, de notre volonté, pour que Dieu vive en nous.

Le carême sera précédé par notre Semaine nivernaise de la Fraternité, entre le 11 et le 17 février. Puisse-t-elle être déjà une belle réponse à tous ceux qui attendent de nous des signes que nous sommes Jésus.

                                                                                               + Thierry Brac de la Perrière

                                                                                                       Evêque de Nevers