Actualités

 

UNE COUPE AU GOÛT AMER

La coupe du monde de football a commencé au Qatar. Moi qui aime bien suivre ce genre d’événement, je n’en regarderai pas un match, tant cette compétition illustre le caractère meurtrier du dieu Argent et les compromissions auxquelles nous sommes tous associés. Les stades climatisés en plein désert, les milliers de morts causés par la construction de ces stades, les conditions d’esclavage subies par les travailleurs immigrés à qui l’on retire leur passeport, tout cela souille les belles pelouses que l’on voit sur les écrans.

Bien sûr il y a d’autres sujets d’indignation, et les souillures de notre Église doivent être les premières à nous révolter. Elles ont encore fait l’actualité de ces dernières semaines et dominé une fois de plus les travaux de l’assemblée des évêques à Lourdes. C’est dans ce contexte que se tient au début de ce mois la récollection d’Avent des prêtres, diacres et laïcs en mission ecclésiale de notre diocèse. Celle-ci prend cette année une dimension pénitentielle forte, à l’approche de Noël, en ouvrant nos cœurs à la Parole de Dieu et en reconnaissant notre besoin de nous laisser transformer en profondeur par cette Parole, qui n’est autre que Jésus lui-même, le Verbe fait chair.

À Noël, Dieu vient à la rencontre de notre monde plein de contradictions, de mensonges et de violences. Il entre par la petite porte, sans s’imposer, pour y mettre sa présence de paix. Il n’est pas venu dénoncer tous les maux de notre société – toute une vie n’y suffirait pas –, il n’est pas venu tout régler par ses miracles – cela ne détruirait pas les causes du mal. Il est venu mettre dans les cœurs les germes de la paix et d’un monde nouveau. Il est venu proposer une paix qui ne vient pas d’en haut mais d’en bas, en nous invitant à nous mettre à la hauteur d’un petit enfant – lui qui a pris le visage d’un petit enfant. Une paix qui ne vient pas de l’extérieur mais de l’intérieur, en nous donnant part à son Esprit, en nous unissant à lui. Il n’est pas venu nous donner des leçons de morale mais se lier à nous, se livrer à nous, au prix de son propre sang.

Un match de foot, malgré tous les millions en jeu, ne vaut pas la vie d’un seul ouvrier tombé sur le chantier. Mais la vie de cet ouvrier vaut le sang versé pour lui – et pour chacun de nous – par le Fils de Dieu né dans une étable et mort sur une croix.

+ Thierry Brac de la Perrière
évêque de Nevers